Chapitre I : L'Ombre de la guerre

Les tambours de guerre résonnent entre les murs de Volantis. Les hauts-gradés s'affairent au sein de La Flèche, les Trois Triarques ont fixé une date pour la reprise des hostilités après deux générations presque paisibles. Les esclaves vont et viennent au sein de la ville pour préparer les troupes et les navires de guerre. Des missives ont été envoyées vers Lys et Myr pour réquisitionner une partie de leurs flottes.

Les trois Tigres de Volantis, élu pour une année, n'ont pas encore divulgué le nom de la cité qui sera la cible de leur désir de conquête. Les tigres sont prêts pour les batailles à venir. Zéphyr Staegone, Hannibal Vaelaros et Vysehna Maegyr, voilà les noms qui resteront peut-être gravés dans les mémoires. Chacun d'entre eux souhaite être réélu en tant que Triarque, chacun ferait n'importe quoi pour satisfaire le peuple, quitte à le manipuler subtilement. Conquérir des cités pour la gloire n'est pas suffisant, ni même pour l'idylle d'un nouvel Empire. Les caisses d'or en provenance des Possessions s'empileront, rendant la cité plus riche encore. Car tel est le bon vouloir des vainqueurs, pouvoir imposer des taxes pour remplir le Trésor de Volantis, et disposer des hommes en âge de combattre pour conquérir d'autres territoires.

En deux générations, les flottes de Lys et Myr ont eu le temps de se reconstruire et de se renforcer. Les soldats sont nombreux et les navires couvrent l'horizon. Les Haut-Magistrats de Lys et Myr étouffent les voix dissidentes qui s'élèvent, l’émancipation des deux cités n'est pas souhaitable. D'après-eux, profiter de la protection de la Première Fille de Valyria est un privilège à protéger. Lys s'ambitionne de devenir l'égal du Tigre, de se défaire de l'étiquette de Possession pour devenir un allié à part entière. Quant à Myr, son Haut-Magistrat compte bien profiter pleinement de la protection de Volantis pour se prémunir des attaques des Dothrakis, le budget investit dans les tributs et cadeaux aux Khals augmente un peu plus chaque année. La cité commence à s'épuiser à force de financer les demeures, les étoffes et les esclaves à offrir aux différents Khals. Ce budget pourrait être réinvesti ailleurs si les Khals étaient enfin repoussés jusqu'à leurs plaines.

Par-delà les kilomètres qui séparent les cités à travers ce vaste continent d'Essos, des murmures circulent d'une oreille à l'autre. Depuis Lorath ou même Braavos, les esprits s'échauffent en entendant parler des Triarques de la grande Volantis. Ils devinent les contours d'une nouvelle guerre, ou plutôt... son ombre qui plane comme une menace au-dessus des têtes. Volantis n'est pas satisfaite, elle est ambitieuse, infatigable et insatiable. Quelques esprits courageux commencent à alerter les seigneurs et membres du conseil, mais la peur s'est envolée durant ces deux générations de paix.

Les grandes Banques qui supportent le monde se frottent les mains, les guerres sont lucratives, mais seulement si elles misent sur la bonne armée. Les belligérants qui s'observent avec mépris ne daignent point tourner leur regard vers l'ennemi qui ne se cache même pas. Volantis, la fille ainée est de toutes les guerres, du moment qu'elle en tire satisfaction. Rien ne saurait la garder loin des terres qui ne lui appartiennent pas.

Comment l'Étranger va-t-il avancer ses pions ? La partie ne fait que débuter.

Les ambassadeurs de la toute jeune cité de la Nouvelle-Ghis sillonnent le Sud-Est du continent pour rejoindre les grandes cités esclavagistes. Chacune accueille les envoyés à bras ouverts pour entendre leurs propositions, Meereen, Yunkaï et Astapor se déclarent depuis des siècles comme les héritières de l'ancien empire Ghiscari. Par delà le désert Rouge, les Treize de Qarth quant à eux se montrèrent plus réservé face à l'invitation des émissaires.

Les émissaires Ghiscari retracent l'histoire passée du Vieil Empire fondé par Grazdan le Grand, la richesse de sa capitale, Ghis, et l'immensité de son territoire. Celui-ci s'étendait sur les rives de la baie des Serfs jusque le long de la vallée de la Skahazadhan, au nord dans la mer Dothrak, et jusque sur le continent sud de Sothoryos, au-delà de la mer d'Été, où fut établie l'ancienne colonie de Gorosh. La puissance de l'Empire ne fut stoppée que par le feu des dragons de Valyria, dont la terre sous leurs pieds en conserve encore les cicatrices. Mais aujourd'hui, ces fléaux des cieux nommés Seigneurs Dragons ont disparu, tout comme leur empire. Valyria n'est plus, et les Valyriens ont péri par les flammes de leurs volcans.

L'heure est venue de redonner vie au Vieil Empire pour étouffer les cendres encore fumantes de Valyria, étouffer sa première fille trop ambitieuse, Volantis. Les Ghiscari de la Nouvelle-Ghis n'ont pas oublié le sort que Valyria réserva à jadis la grande cité de Ghis, ses terres rasées, semées de sel, de soufre et de crânes. L'ombre de l'immense pyramide de Ghis, haute de huit cents pieds de haut, repose désormais sur un vaste champs de ruines et de cendres, l'œuvre du feu des dragons de Valyria. Plus personne ne foule cette terre désolée, maudite, seulement quelques spectres égarés venus de ce lointain passé. Il ne reste aujourd'hui que des ruines de la cité, et des squelettes des dragons de l'ancien empire Valyrien.

La puissance des cités de la Baie des Serfs est à son paroxysme, l'argent et les esclaves coulent à flots. La puissante armée des Immaculés est entre leurs mains, personne ne se dresse devant eux, hormis Volantis. Les cités libres, orphelines biens heureuses de Valyria, se jalousent entre elles, prêtes à se chamailler. Les Judicieux de Yunkai, leurs Bontés d'Astapor et les Grands Maîtres de Meereen n'ont qu'un mot à dire pour conclure l'une des plus grandes alliances de l'Histoire. La décision leur appartient, le monde ne les attend pas.

L'immense bâtiment en forme de chèvre s'enflammait tel un brasier ardent, le temple était gagné par les flammes comme un feu de paille. La charpente calcinée s'écroulait sous son propre poids, ne soutenant plus les toitures qui s'abattirent sur les quelques fidèles prit au piège dans la salle destinée aux sacrifices.

Dehors, le gros des fidèles de la Chèvre Noire était réuni devant le temple, les prêtres encapuchonnés allaient et viennaient pour chercher de l'aide. Quelques dizaines de soldats immaculés parcouraient dans les rues à la recherche des incendiaires qui auraient profané le grand temple si cher à la cité. Certains fidèles s'agenouillaient devant la catastrophe, priant de plus belle leur divinité pour lui demander de les pardonner et de protéger la ville des flammes dévastatrices. Alors que l'incendie était hors de contrôle, dévorant le temple, des murmures s'élèvaient entre les rangs des prêtres. Certains accusèrent les adorateurs de R'hllor d'avoir profané le temple avec leurs flammes sacrées, d'autres pointèrent les prêtres barbus de Norvos d'avoir mené une attaque à leur encontre. Un coupable devait être trouvé, accusé et jugé, le contraire ne serait pas toléré.

Pour la justice, les autorités avaient ordonné aux Immaculés de fouiller les demeures des adorateurs de R'hllor et de mettre à sac leur temple pour rechercher des preuves. Les alibis de chaque fidèle du dieu rouge furent écoutés, mit en doute, et puis soigneusement noté. Finalement, les officiers entendirent les confessions de témoins accusant un groupe de fidèles de R'hllor d'avoir été vu près du temple un peu avant l'incendie. Leur procès fut l'un des plus rapides qu'il a été vu dans les mémoires des habitants. Le matin ils furent jugés, et en fin d'après-midi ils furent sacrifiés pour apaiser le courroux de la Chèvre Noire. Avant de mourir, l'un d'eux accusa les prêtres de Norvos de l'avoir envoyé pour qu'il mène un groupe pour incendier le temple du démon. La stupéfaction gagna la foule sous l'accusation, beaucoup s'indignèrent d'une telle attaque, et d'autres crièrent pour demander vengeance. Le peuple commença alors à se soulever pour exiger le saccage des temples du dieu sans nom de Norvos. Le peuple en oublia l’implication des fidèles de R'hllor tellement la nouvelle était grave. Les prêtes rouges de Qohor profitèrent de cette accalmie à leur encontre pour souffler un vent de paix sur leurs fidèles, tout en appuyant la faute des prêtres barbus de Norvos.

Un cavalier quitta précipitamment la cité pour rejoindre Norvos afin d'informer les prêtres des événements de Qohor. Les adorateurs du malin réclamaient leur vie pour les sacrifier à leur démon. Peu après l'arrivée de ce premier cavalier, une troupe arriva devant les portes de Norvos pour y planter une pique sur laquelle trônait la tête du traître. La guerre était imminente, les prêtres barbus se préparaient déjà à combattre les troupes du démon nommé la Chèvre Noire, tandis que les troupes de Qohor se voyaient déjà faire couler le sang des hérétiques.

Il y a de cela 8000 ans, la Longue Nuit assombri le ciel de Westeros... Mais pas seulement celui de Westeros, celui du monde entier. La période de ténèbres dura des jours, des semaines, des mois... On dit que le froid était si intense qu'il fit geler le fleuve de la Rhoyne, berceau de la civilisation Rhoynar. L'hiver dura toute une génération, affamant les populations, détruisant des civilisations... Des enfants naquirent et moururent sans jamais connaitre le soleil. On dit qu'à Westeros, dans la brume et les ténèbres vinrent les Autres.. Ils montaient des chevaux livides, et chaque homme qu'ils tuaient se relevait pour venir grossir les rangs de leurs armées de morts-vivants.

À Westeros, un héros se leva à la recherche des enfants de la forêt, sa quête dura des années, et il y perdit tous ses compagnons. Mais il n'était pas seul... D'autres se levèrent par-delà le monde, joignant leurs forces pour vaincre l'obscurité. Les ténèbres finirent par ployer, et les Autres furent vaincus lors d'une grande bataille qui marqua l'Histoire. Les Autres furent repoussés derrière un immense Mur de glace bâti conjointement par les Hommes et les Enfants de la Forêt. Le Mur était si haut qu'il cachait la lumière du soleil.

Mais un deuxième Mur fût construit de l'autre côté du monde, sur les terres les plus à l'Est du monde connu. La légende raconte que la Longue Nuit serait survenue à cause de la Trahison du Sang, lorsque le frère de l'Impératrice Améthyste la tua pour lui ravir le trône, cet homme est plus connu sous le nom d'Empereur de Jaspe de Sang. Par ses actions, en usurpant le trône et en répandant la terreur, il conduisit leur déesse la Jouvencelle-de-Lumière à se détourner des hommes, laissant le Lion de la Nuit les punir par cette période de ténèbres. Les hordes de monstres se jetèrent contre les murs des 5 forts, jadis construits par l'Empereur de Perle à l'entrée du désert gris. En plus des forts, les Hommes construisirent un immense mur de pierre noir, haut de mille pieds, capable de protéger le Yi-Ti des démons du Lion de la Nuit. Mais un héros se leva pour faire cesser la Longue Nuit, un homme nommé Hyrkoon, porteur d'une épée de flamme.

En même temps, un Rhoynar implora Mère Rhoyne, la déesse du fleuve, ainsi que les divinités qui étaient ses enfants, de se réunir et de chanter une chanson magique qui ramènerait l'aube. A Asshaï, un héros combattant nommé Azor Ahai forgea une épée qu'il travailla pendant cent jours et cent nuits, et avec laquelle il transperça le coeur de sa bien aimée pour combiner l'acier de l'épée avec l'âme de sa femme, créant l'épée connue sous le nom de Lightbringer. Il brandit ensuite son épée dans une bataille contre l'obscurité pour regagner l'aube. Les ténèbres furent vaincues, le soleil brilla plus fort que jamais, et l'été revient avec lui.

Les prêtres prophétisèrent qu'un jour le champion  Azor Ahai renaîtra pour combattre l'obscurité, il s'y opposera et s'il échoue, le monde échouera avec lui.

"Il viendra un jour après un long été où les étoiles saignent et le souffle froid des ténèbres tombe lourdement sur le monde. En cette heure effrayante, un guerrier tirera du feu une épée brûlante. Et cette épée sera Lightbringer, l'épée des héros, et celui qui la brandira sera Azor Ahai revenu, et les ténèbres s'enfuiront devant lui."

Près de 5000 ans après la Longue Nuit, les veilleurs du Mur bordant le désert gris perçurent du mouvement. Des ombres à la silhouette humaine avançaient dans la brume glaciale du désert givré. L'alerte fut donnée pour avertir les quatre autres forts, mais les forteresses qui accueillaient jadis plus de dix mille hommes chacune n'en avaient plus que quelques petites centaines. Quelque chose approchait du Mur, les veilleurs pouvaient entendre la terre vibrer, gronder sous leurs pas... Que les dieux aient pitié d'eux.

À ce même moment, le Grande Prêtresse de Volantis, Première Servante du Seigneur de la Lumière voyait l'événement dans les flammes. Elle vit la mort, le froid et la nuit... Le retour de la Longue Nuit. Elle envoya plus de prêtres et prêtresses à travers les cités, pour qu'ils annoncent la venue de la Mort, les Ténèbres sont en en marche, et ils recouvriront le ciel une nouvelle fois.

Le vent hurle, gronde... sifflant entre entre monts et montagnes, certains pourraient croire discerner les grondements d'un dragon. Mais les dragons sont éteints... n'est-ce pas ? Le son des battements de leurs ailes est si caractéristique... leur silhouette monstrueuse déchire la quiétude du ciel d'été. Mais ce n'est pas un dragon. Tout droit sorti de l'épaisse brume qui recouvre les terres de l'été constant, quelques spécimens de Wyverns explorent les montagnes Peintes, elles ont fait un long voyage depuis le continent de Sothoryos. Pourquoi migrent-elles si loin de chez elles ? Personne ne le sait, à part peut-être ce groupe de magus ? Ces guerriers qui guette le ciel avec un visage fermé, un dragon est sculpté sur leur médaille. Le chef du groupe, Yoren Volmark, observe les draconides avec curiosité, puis il resserre sèchement son épaisse fourrure autour de ses épaules avant de regagner l'intérieur du château qui abrite les magus de l'Ordre du Dragon. Il sait que ces créatures volantes sont une grande menace pour les populations, mais peut-être vaut-il mieux attendre que les premières victimes se fassent ? Un nouvel âge d'or pourrait surprendre les tueurs de monstres.

À des centaines de kilomètres de là, vers l'Est du continent, bordant la mer Grelotte, l'Ordre des magus de la Firewyrm est assiégée une dizaine de Trolls des rochers venu se plaindre bruyamment. Ces différents groupes de trolls tout droit venus de la forêt des Iféquevron ont fait le pénible déplacement pour se plaindre auprès du Chef des Magus de la recrudescence du nombre d'araignées géantes dans la forêt. Les araignées pulluleraient depuis des semaines, pondant des oeufs dans les cavernes et grottes de ces pauvres trolls qui s'en retrouvent chassés de force, et obligés d'abandonner leur ragoût mijotant sur le feu. Le Chef des Sorcleurs, Hang-ki Lee, apitoyé par ces trolls, accepte de les accueillir le temps de rétablir l'ordre dans la mystérieuse et redoutée forêt. Néanmoins, il sait que la tâche ne sera pas si simple, car si les araignées ne sont pas venimeuses... elles peuvent néanmoins dépasser un magus grâce à leur surnombre.

Plus à l'Ouest, les magus des différentes Ordres se battent contre une recrudescence de harpies et de sirènes volantes, d'infâmes et coriaces monstres difficiles à éradiquer, et qui sèment les cadavres de voyageurs dans toute la région des cités libres. Malgré le sang versé, quelques personnes arrivent tout de même à se satisfaire un minimum de la situation, comme les maîtres invocateurs et les maîtres métamorphes, qui voient leurs répertoires d'invocations et métamorphoses s'agrandir grâce à quelques nouvelles créatures très intéressantes.

Les paysans et les marchands ambulants prient leurs dieux avant de s'éloigner de chez eux, emportant avec eux toutes sortes de babioles et breloques censées garder à distance les monstres des histoires de leur enfance. Qu'ils soient Seigneur de la mer, Magistrat, Triarque ou bien Archonte, chacun s'organise pour mettre à prix les têtes des créatures qui terrifient femme et enfant, et supplie les magus d'intervenir, en échange de lourdes sommes d'or et d'argent. Jamais les magus n'avaient autant croulé sous les contrats et les mises à prix, le temps des magus est de nouveau arrivé.